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Le bénéfice du séjour vénitien de Piranèse est sensible dès la première édition des Carceri, vers 1749. Il s’agit d’une série de quatorze planches où l’artiste développe le thème exploité dans la planche « Carcera oscura » de la Prima parte et déploie toutes les sombres magnificences de ses dons de peintre. S’il n’est issu d’aucune tradition iconographique, le thème a un point de départ connu : c’est le décor créé par l’architecte et ornemaniste Daniel Marot pour l’opéra La Prison d’Amadis, mais, sous le burin de Piranèse, les variations qui en découlent, amplifiées, donnent lieu à des fictions saisissantes empreintes de malaise où s’exprime un génie très personnel et ombrageux. Sans équivalent dans la production iconographique du temps, il s’agit là d’un rêve de pierre où les silhouettes humaines, errantes ou suppliciées, ne semblent présentes que pour animer vainement des espaces indéfinis et sans échelle.
La technique est étonnamment libre, le geste ample et léger. Au contact de Tiepolo dont l’œuvre gravé, bien que confidentiel, est particulièrement prisé des amateurs, Piranèse a sans doute appris que l’on pouvait manier la pointe comme la plume d’un dessinateur qui improvise, se servir des morsures de l’acide comme d’une palette. De la Prima parte aux Carceri, on observe une forme de prise de conscience chez Piranèse qui semble saisir alors que la gravure peut prétendre à un autre rôle que celui de servante impersonnelle de l’architecture dont elle reproduit et répand les ouvrages, pour s’affirmer comme un art complet qui se suffit à lui-même et peut tout exprimer. Les planches de la Prima parte étaient un peu sèches : c’est encore la belle rigidité monotone des graveurs d’architecture.
Au contraire, dans les Carceri, l’artiste donne une souplesse inédite à son dessin gravé qu’il apprend à colorer vigoureusement au moyen de morsures profondes. Reste que l’inventeur des Prisons doit beaucoup à la décoration théâtrale. En outre, comme dans les planches de la Prima parte et les grandes estampes postérieures, l’adresse de la mise en page, la composition et les effets de lumière sont la manière d’un décorateur de théâtre qui sait utiliser et agrandir son cadre par l’illusion de la perspective.
Il est probable que c’est au début des années 1760 que Piranèse reprend ses Carceri et qu’il leur donne leur forme définitive : le lumineux cahier vénitien exécuté avec une franchise un peu lâche disparaît sous les surcharges et se trouve saturé d’effets de morsure. Bien qu’ayant perdu le feu de la première, cette seconde version est beaucoup plus élaborée. A côté des dessins légers de la première édition, les planches de la seconde sont énergiques et nuancées comme des œuvres peintes, de telle sorte que Piranèse donne aux motifs une puissance colossale nouvelle, ainsi qu’une effrayante solennité. D’une édition à l’autre, on passe du décor de théâtre au drame.
La Prima parte di architetture... |
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